« C’est un des projets les plus faciles à réaliser. J'ai chanté les chansons que j’aimais, naturellement. Nous avons enregistré les 13 morceaux du disque en trois jours. (Interview in Rolling Stone US);
Entre deux tournées et des enregistrements avec Donald Fagen et Michael McDonald, Boz Scaggs a trouvé le temps de s’arrêter dans un studio pour enregistrer son premier CD depuis cinq ans. Le Royal Studio de Memphis est symbolique, c’est celui où Willie Mitchell a capté les plus beaux enregistrements d'Al Green.
C’est Steve Jordan qui est aux manettes et à la batterie, avec Ray Parker Jr guitare, Willie Weeks à la basse, Spooner Oldham aux claviers, la section de cuivre des The Memphis Horns et l’harmonica magique de Charlie Musselwhite.
Album de reprises donc et hommage à un son spécifique, des titres d’Al Green, Moon Martin, Willy Deville…
Album qui coule tranquillement, quelquefois un peu trop c’est mon seul petit reproche, « So Good To Be Here » de Green résume parfaitement la tonalité globale de l’opus, des guitares, douces, « smooth », et la voix superbe de Boz qui semble planer au dessus. L’atmosphère est à la farniente, un peu comme dans un club chic; une fin d’après-midi ensoleillée, après la partie de golf ou de polo, quand tout le monde se retrouve pour boire un verre dans des fauteuils profonds et cossus. Avec un « Mixed Up Shook Up Girl » comme cocktail sophistiqué,. la chanson de Willie Deville prend ici toute sa dimension.
Mélange subtil de soul et de blues comme si l’idée était de fondre ces deux genres de musique crées par les Noirs dans un ensemble unique. « Rainy Night in Georgia » est magnifique,écrite Tony Joe White, l’homme des bayous, et des sacrés pointures l’ont chantée (Ray Charles, Benton Brook, Randy Crawford…) mais la version proposée ici soutient largement la comparaison avec ces illustres prédécesseurs.
« Corinna, Corinna » très épurée avec la guitare acoustique et la voix superbement posé est l’exemple type de transformation d’une chanson un peu mièvre en superbe ballade.
On retrouve une ambiance boogie/blues feutrée avec “Cadillac Walk” qui n’aurait pas fait tache sur un album de Daniel Lanois et le superbe «Dry Spell» avec les licks de Ray Parker Jr et l’harmonica de Charlie Musselwhite.
Mais ce genre d’album ne se décortique pas, il est conçu comme un tout, à écouter dans son ensemble, ce qui en amplifie la totale cohérence entre les titres et les atmosphères.
Je disais en terminant la chronique de Old Sock, le dernier Clapton que le meilleur disque de ce dernier en 2013 était sorti par Scaggs. En effet, si les projets de base sont assez similaires, (se faire plaisir en reprenant ses chansons préférées) le résultat final est complètement aux antipodes. Clapton nous sert un disque fourre-tout avec quelques morceaux sympathiques, Boz Scaags, un CD équilibré, s’écoutant comme un ensemble complet et cohérent.
Memphis est l’album d’un orfèvre doué, passionné, convaincant et émouvant.
A ne pas rater.
Gone Baby Gone
So Good To Be Here
Mixed Up Shook Up Girl
Rainy Night in Georgia
Love on a Two Way Street
Pearl of the Quarter
Cadillac Walk
Corinna, Corinna
Can I Change My Mind
Dry Spell
You Got Me Cryin’
Sunny Gone
Boz Scaggs guitares
Steve Jordan batterie
Ray Parker Jr guitar
Willie Weeks basse,
Spooner Oldham
The Memphis Horns cuivres
Charlie Musselwhite harmonica